Anne Boëls, au piano
24.09.2018 par LR
num.282 octobre 2018 p.15
Retour des concerts classiques … au Boléro

Au clair de lune

Vous l’aurez deviné, comme annoncé il y a six mois, les concerts classiques du dimanche, anciennement aux Caves de Bon-Séjour, fermées pour travaux durant deux ans, ont repris au Boléro, dans la galerie des expositions transformée en partie en salle de concert.

Après les mots de bienvenue d’Olivier Delhoume, délégué à la culture et ceux de Brigitte Siddiqui, responsable de l’Association des concerts classiques du dimanche, c’est avec une grande pianiste qu’est Anne Boëls, venue déjà parmi nous, que s’ouvrit cette heure musicale consacrée au centenaire de la mort de Claude Debussy (1918-2018). Le thème en était « Le Piano et la Lune ». Coïncidence : on était la veille de la pleine lune dans un ciel dégagé et étoilé, autant de scintillements parallèles dans le parcours des œuvres présentées : Nocturne op. 38 n°1 en mi bémol majeur de Gabriel Fauré. Déjà on se met dans l’ambiance d’une douce soirée d’été, jeu subtil des petits mots de lumière dans le souffle d’une brise. Puis Claude Debussy étincela sous les doigts agiles de l’artiste avec « La Terrasse des audiences du clair de lune », tirée du 2è livre des Préludes, enchaînée avec « Nocturne » et « les sons et les parfums tournent dans l’air du soir » écrits sous l’influence d’un poème de Baudelaire « Les harmonies du soir » récité en prélude par Anne Boëls. Toute la quintessence de ces vers pleins de charme ressortait à travers la musique illustrant senteurs, tourbillons, douceur, méditation, couleur et formes, sensations dans le parcours vertigineux des nuances. Illustration plus belle encore que « Soirée dans Grenade (tirée d’Estampes) » raviva cette ambiance espagnole qui nous est agréable : guitare, danse, fiesta retentissante rythmée par les claquettes et les chants. L’Andalousie résonnait dans nos cœurs, dans le rythme ou la délicatesse des harmonies.

Beethoven : douceurs et rêverie dans le premier mouvement de la « Sonate au clair de lune ». Régal des tonalités, des thèmes répétés et modulés, diffusant secrets, évocations, mystères, autant de richesse dans l’intimité de la nuit. 2ème et 3ème mouvements, le tempo va crescendo dans un florilège de magnifiques harmonies jonglant sur les graves et les aigus jusqu’à l’extase finale de cette pleine lune qui nous enthousiasme.

Changement de tonalité avec « Et la lune descend sur le temple qui fut » de Claude Debussy. Véritable kaléidoscope de couleur et de reflets éphémères en tranches délicates.

Sergei Prokofiev nous livre par le talent de l’artiste un regard enfantin sur la nature, dans « Sur les prés la lune se promène ». Petit joyau de légèreté et de charme en pensant à notre chanson d’enfance : Au clair de la lune, mon ami Pierrot, … et ce rai de lumière qui prend son temps.

Et l’on passe à Frank Martin, compositeur suisse mis à l’honneur dans « Clair de Lune », œuvre écrite en 1952 en l’honneur de Chopin. Etonnante musique aux accents joyeux, à la mélodie captivante, enchanteresse. Nuances, finesse, sensibilité, Anne Boëls nous épate, et nous transmet ses émotions dans l’interprétation adéquate et parfaite nous reliant au « Nocturne » opus 27 n°2 en ré bémol majeur de Chopin. La virtuose dans ce jeu musical livre l’excellence de son immense talent. Et l’on rêve au bonheur de la nuit.

Pour terminer, on revient à Debussy dans « Clair de lune » (Suite Bergamasque) où récitant un poème sur la nature, Anne Boëls nous entrouvre une porte dans une fluidité d’accords expressifs sur ces paysages féériques aux accents jubilatoires.

« Le Soleil a rendez-vous avec la lune » chanté en bis par l’artiste mit un point final à cette excellente soirée misée sur la lune qui nous fera rêver encore longtemps.
Lucette Robyr


Photo Siddiqui
 

auteur : Lucette Robyr

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