02.10.2023 par ALBB
num.333 novembre 2023 p.13
Vengeron : un chantier de tous les superlatifs !

Le Vengeron est un poisson qui a donné son nom à un petit ruisseau, d'une longueur de 2.4 kilomètres et enterré à 54% sous les routes et le train entre Chambésy et Bellevue. Cette appellation est pourtant célèbre, puisqu’utilisée pour une plage et l’échangeur de l’autoroute. A cet endroit, les SIG ont installé une station de pompage XXL qui permettra d’alimenter les circuits de chauffage et rafraichissement à distance GeniLac pour la région de l’aéroport (en circuit fermé) et celui du centre-ville de Genève avec un retour de l’eau dans le Rhône en aval.

Ce projet est la colonne vertébrale de la politique énergétique du canton de Genève. Son but est de diminuer les émissions de CO2 de 70'000 tonnes par an, en offrant du chauffage en hiver et de la fraîcheur en été à plus de 350 bâtiments, dont celui de l’aéroport. Cette station de pompage produira l’équivalent de la consommation de 27'000 ménages de manière renouvelable et locale. Le coût total de la construction de GeniLac se monte à environ 900 millions de francs, dont 111 pour la station de pompage du Vengeron.

Comment cela fonctionne-t-il
L’eau est pompée à 45 mètres de profondeur à une température constante de 7°C. En été, cela permet de refroidir celle du circuit qui rafraîchit les bâtiments. En hiver, c’est l’inverse. 7°C sont suffisamment élevés, ce qui permet, à travers l’utilisation de pompes à chaleur, de tempérer les radiateurs de manière adéquate.

Eau pompée et rendue à la nature
L’eau sera puisée à une profondeur de 45 mètres, tout en douceur, afin de respecter le biotope du fond lacustre. Le projet a dû être adapté à la récente invasion des moules quagga. Des systèmes de raclage mécanique des conduites sont prévus pour éviter qu’elles ne soient bouchées, engendrant un coût supplémentaire de 7 millions de francs. Actuellement, seules quatre pompes sur dix sont installées. Deux d’entre-elles serviront au circuit de l’aéroport qui, dès 2024, bénéficiera de cette technologie innovante. L'eau utilisée sera rendue au lac près du Vengeron.

Il faudra encore attendre 2026 pour que le centre de la ville de Genève soit aussi relié et que les six autres pompes soient progressivement installées et branchées. Des sections de tuyaux de plus de 80 mètres doivent encore être posés par des plongeurs professionnels au fond du lac. Ce réseau sera connecté à celui de Genève-Lac-Nations qui fait ses preuves depuis 2008. L’eau utilisée pour ces quartiers sera rendue au Rhône en aval du pont du Mont-Blanc.

Le retour de l’eau dans le lac ou le Rhône se fait de manière diffuse, grâce à des tuyaux en forme de clarinette (*il s’agit des crépines servant à l’aspiration qui sont en forme de pomme d’arrosoir), afin de respecter les biotopes et éviter tout accident.

Lors de la présentation de la station de pompage, Michel Balestra, Président des SIG, a expliqué que le cœur de Genilac se trouvait dans un décor magnifique qui sera à nouveau public puisque l’installation est souterraine. Une fois le chantier terminé, une zone portuaire et de loisirs sera à la disposition de tous. Christian Brunier, Directeur des SIG, a évoqué les 400 travailleurs répartis en 30 corps de métiers qui ont collaboré afin de réussir cette performance technique. Ce projet a demandé de longues études préliminaires, sans compter la levée de recours, avant que le chantier ne soit entrepris juste avant la crise du covid, provoquant des délais supplémentaires. Antonio Hodgers, Président du Conseil d’État, s’est réjoui de la concrétisation du plus grand programme écologique de Genève permettant de décarboner notre canton. Il y a encore d'autres idées à développer, comme la biomasse ou la géothermie, pour parvenir à ce but. Efforts et réflexions supplémentaires seront indispensables pour atteindre, à terme, la souveraineté énergétique du canton.

Après les discours, les participants ont été invités à visiter l’installation. Devant la taille monumentale des machines, les personnes se sentaient comme des fourmis. Chaque engin a été pensé avec minutie, tant du point de vue technique que celui de la sécurité ou de la complémentarité. A noter aussi que les concepteurs n’ont pensé "grand" que pour assurer l'avenir. Vu l'importance des travaux nécessaires, autant prévoir une évolution possible sur plusieurs décennies !

Gageons que ce système innovant, allié à d'autres développements encore à imaginer, permettra à notre canton de se libérer à terme de sa dépendance au pétrole ou gaz adéquatement, offrant ainsi un meilleur avenir aux futures générations.

Photos : albb

 

auteur : Anne Lise Berger-Bapst

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