18.05.2022 par SL
num.319 juin 2022 p.09
28 Juillet: Journée Mondiale de la Lutte contre l'Hépatite

La Journée mondiale contre l’hépatite, a lieu chaque année le 28 juillet,  et vise à sensibiliser le public aux conséquences sanitaires, sociales et économiques de cette maladie, à encourager l’engagement des individus, des partenaires publics et privés, notamment les gouvernements et les bailleurs de fonds, pour une riposte mondiale plus énergique en vue d’atteindre les cibles des objectifs de développement durable (ODD) et de la stratégie globale de l’élimination de l’hépatite virale (HV) en tant que menace pour la santé publique promue par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) d’ici à 2030.

La date du 28 juillet a été retenue car elle correspond à celle de la naissance du lauréat du Prix Nobel, le Dr Baruch Blumberg, qui a découvert le virus de l’hépatite B et mis au point un test et un vaccin contre ce virus. Il existe cinq souches principales du virus de l’hépatite – A, B, C, D et E.  Le virus de l’hépatite B et C sont les plus courants.

Une personne meurt toutes les 30 secondes d’une hépatite virale

Dans cette article je vais vous parler que de l’hépatite C (HVC) car elle est un cas unique parmi les maladies infectieuses : elle peut facilement se soigner mais continue pourtant de tuer. Pourquoi?

La transmission

L’hépatite est une infection virale qui se transmet par le sang, s’attaque au foie et peut entraîner aussi bien une affection aiguë que chronique. Si elle n’est pas traitée, elle peut provoquer des infections chroniques et entraîne un risque important de décès par cirrhose ou cancer du foie pour les personnes exposées.

L’HVC est transmise le plus souvent lors de pratiques d’injection à risque, notamment dans la réutilisation ou la stérilisation insuffisante de matériel médical dans les établissements de soins de santé ou chez les consommateurs de drogues injectables. Elle est également transmise par l’exposition au sang ou à des liquides biologiques infectés, notamment dans la transfusion de sang et de produits sanguins n’ayant pas fait l’objet d’un dépistage.

Epidémiologie

Selon estimations de l’OMS pour la seule année 2019, l’HCV ont causé 1,5 millions de nouvelles infections et 290.000 de décès dans le monde. Elle estime par ailleurs qu'environ 2.3 million de personnes sont co-infectées avec le HIV et l’HCV.

58 millions de personnes vivent aujourd'hui avec une infection chronique par le VHC dans le monde, en grande majorité dans les pays à revenu faible et intermédiaire où les populations ont peu, voire aucun accès au diagnostic et au traitement. L’Europe orientale, l’Asie centrale et orientale, l’Égypte, la Chine et le Pakistan sont principalement touchés par la maladie.

En Suisse, on estime à 40'000 le nombre de personnes infectées par le VHC. Les personnes nées entre 1950 et 1985 en sont plus fréquemment touchées. Chaque année, environ 1'300 nouveaux diagnostics sont déclarés à l’OFSP. Parmi celles-ci, environ 500 personnes consomment des drogues. Le VHC est la cause la plus fréquente de cancer du foie et de transplantations de foie en Suisse. Environ 200 personnes meurent chaque année des suites du VHC.

Traitement

L'infection par le VHC est “silencieuse” car elle se déroule la plupart du temps sans symptômes. Le diagnostic peut donc être posé même plusieurs années, voire décennies, après l’infection, laissant la maladie avancer entretemps.

Sur les 58 millions de personnes estimées atteintes dans le monde, seulement 21% ont été testées, donc seulement 13% ont été soignées en 2019. Selon les estimations, jusqu'à un tiers des personnes infectées par le VHC en Suisse et jusqu’à 50 % des personnes en traitement pour des problèmes d’addiction ne sont pas testées.

Depuis l’introduction en 2014 de nouveaux médicaments contre l’HVC, appelés antiviraux à action direct (AAD), très efficaces et bien supportés, des progrès considérables dans la lutte contre la maladie peuvent être réalisés. Environ 95% de personnes qui ont contracté l’HVC peuvent être soignées après un traitement, par voie orale de 12 semaines. Ce traitement a aussi l’avantage d’empêcher la transmission de l’infection.

Bien que la maladie soit curable, des barrières d’accès au diagnostic et au traitement, notamment le prix, ainsi que des infrastructures médicales insuffisantes surtout dans les pays à revenu faible et intermédiaire concernés ne garantissent pas un accès équitable à la prévention et aux soins, conformément à l’engagement de l’OMS en faveur de la couverture sanitaire universelle.

Le prix du traitement et la prise en charge de celui par le système sanitaire national ou par des assurances privées varient en fonction des pays, notamment des ressources budgétaires ou aux aides au développement disponibles pour mettre en place de programmes nationaux d’élimination pour atteindre les objectives du 2030.

Sous la pression des sociétés civiles, les prix ont chuté de façon spectaculaire grâce aux licences volontaires octroyées aux fabricants de génériques. Cependant, dans la plupart des pays à revenus intermédiaires, trop riches pour avoir accès aux génériques selon les règles des brevets internationaux, mais pas assez pour payer le prix fort, les AAD restent inaccessibles.

Le coût de 12 semaines de traitement d'AAD générique varie de 45 dollar par patient traité au Pakistan (sans licence) à environ 700 dollar en Égypte (sous licence). Ces pays peuvent également se procurer le même AAD auprès de l’initiateur, Gilead, au coût de 1 200 dollar par patient. MSF a signé un accord pour obtenir les AAD génériques à un prix spécial de 75 dollars par traitement dans la plupart de ses projets. Par contre, la facture pour un traitement complet dans des pays à revenu haut est beaucoup plus salée et dépend des accords signés avec les producteurs. En Europe ça peut coûter entre 6.000-25.000 euro par traitement.

En Suisse ils sont remboursés par l'assurance maladie obligatoire, indépendamment de l'évolution de la maladie et des facteurs de risque tels que la consommation de drogues ou d'alcool.

Eliminer l’HVC c’est possible

Bien qu’il ait pas un vaccin pour se protéger contre l’HVC, il est possible d’envisager un avenir sans HCV grâce aux technologies disponibles et à un effort concerté.

Pour atteindre l'objectif mondial d'élimination d'ici 2030, il faudrait une forte volonté politique des pays concernés et la mise en place de programmes nationaux de prévention, dépistage, traitements et soins, à grande échelle et financièrement soutenables, surtout dans les pays à revenu revenu faible et intermédiaire.

Contrairement au grand soutien des bailleurs de fonds internationaux publics et privés dans la lutte contre la TB, la malaria et l’HIV, ainsi que celui sans précédent contre la pandémie de la COVID-19, aucun bailleur de fonds majeur ne s'est engagé à financer l'écart de 7 milliards de dollars annuels nécessaires pour l'élimination d’ici 2030, malgré les 2,1 millions de décès liés à l'HVC qui pourraient être évités et les solides arguments coûts-avantages.

Par ailleurs, il a été estimé que l’élimination va aussi apporter des bénéfices sanitaires et socio-économiques indirects, notamment une diminution des coûts de santé liés aux maladies non communicables, une amélioration de la qualité de vie et de la productivité.

L' hépatite ne peut plus attendre!

Plus d’info www.who.int/fr et www.worldhepatitisalliance.org

 

auteur : Sabrina Lanzavecchia

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