23.03.2021 par YR
num.307 avril 2021 p.03
Jetons de présence et indemnité « informatique » : que touchent nos élu-e-s ?

Jetons de présence et indemnité « informatique » : que touchent nos élu-e-s ?

Lors de la séance de mars 2021 du Conseil municipal versoisien, les élus ont unanimement accepté de changer une pratique de dédommagement les concernant, suite à une demande émise par l'OCAS (Office cantonal des assurances sociales).

L'indemnité informatique est remplacée par un jeton forfaitaire. Mais que sont donc que ces indemnités et ces jetons ? Pour y voir plus clair, Versoix Région a sorti sa fidèle loupe !

Tout travail mérite salaire

Élus du peuple, nos députés du municipal reçoivent bien plus que le prestige de représenter les habitant-e-s de Versoix : ils travaillent tout au long de l'année : commissions, séances plénières, évènements divers, etc.

Si la politique n'est toujours pas un métier à part entière dans notre pays (sauf illustres exceptions), nos institutions considèrent cependant que les heures investies dans le cadre de leur mandat mérite une forme de salaire.

Pour les membres du Conseil municipal, un document officiel détaille que les élus perçoivent « un jeton de présence d'un montant de 120 CHF pour les séances de commission, du Conseil municipal, et du Bureau » de ce dernier, peu importe leur durée. Selon nos observations sur les 5 dernières années, les séances plénières du Conseil municipal durent environ 2h15. Approximativement, cela représente un taux horaire approchant les 54 CHF de l'heure. Notons que ce calcul n'incorpore pas le temps de préparation ultérieur aux commissions, mais préalable à la plénière, puisque les élus n'assistent pas tous aux mêmes commissions.

Au delà de ce jeton de présence standard, d'autres sont prévus : les président-e-s de commissions se voient octroyer « un demi-jeton de présence supplémentaire pour chaque séance qu'ils président » (leur traitement s'élève donc à 180 CHF la séance présidée). Quant au président du Conseil municipal, il reçoit un jeton de présence forfaitaire — un montant versé une seule fois au titre de son année de présidence — de 1'800 CHF. Absent de ce document, un autre aspect est à prendre en compte : le fait que certain-e-s élu-e-s peuvent siéger au conseil d'une fondation communale, si leur parti a choisi de les y appointer. Ce portefeuille vient également avec une forme de jeton de présence.

Financement indirect des partis

Les jetons de présence vont-ils tous directement aux élu-e-s ? Pas complètement ! Le président du Conseil municipal, Yves Richard (Verts), nous explique que « sur ce montant, le membre du Conseil municipal reverse une part à son parti politique dont il assure ainsi une part du financement destiné à l’action politique, notamment pour les campagnes de votation ou électorales. Cette part n’est pas la même pour tous les partis, ce sont des règles internes qui fixent les pourcentages de rétrocession. ». Chaque parti voit midi à sa porte et demande un partage potentiellement différent des autres.

En termes plus techniques, il s'agit ici d'un financement indirect aux partis politiques. Au lieu que l'Etat subventionne intégralement ou partiellement les partis (comme c'est le cas en France, selon leurs résultats électoraux), ce sont les élus qui choisissent de dériver une partie du revenu lié à leur mandat vers le parti dont ils portent l'étiquette. Cette pratique est également courante au niveau des cantons ainsi que pour les élus fédéraux siégeant à Berne.

Sur l'indemnité informatique, l'OCAS tique : on vous explique

Après une inspection intervenue à l'été 2020, l'OCAS a trouvé à redire à l'indemnité dite « informatique », constatant que cette indemnité devait faire l'objet de charges sociales. Selon le bureau du Conseil municipal, l'OCAS n'a pas demandé à la commune de Versoix de rattraper des charges manquées, mais simplement de corriger son système pour 2021. Ce changement a été fait sans opposition, abstention ou débat en plénière dès la première séance de l'année. Autrement dit : Versoix a obtempéré immédiatement, et sans faire d'histoires.

Contacté par nos soins, le président du Conseil municipal explique que l'indemnité informatique remonte à 2006, et a été une pratique courante jusqu'en 2020. « Dès 2005, Versoix s’est rapprochée de la plateforme informatique du SIAG, le service informatique de l’Association des Communes Genevoises, plateforme baptisée CMNet, afin de faire porter la charge des impressions aux membres du CM », au lieu de transmettre la documentation par courrier comme c'était préalablement le cas.

Suite à cette informatisation de la transmission de documents et d'informations, « la question s’est alors posée de savoir s’il fallait équiper chacun-e d’un ordinateur (comme c’est le cas par exemple au Grand Conseil). Mais plusieurs étaient déjà équipés, et il n’y avait pas d’unicité dans l’équipement : une partie travaillait avec des appareils Apple-Macintosh, et l’autre avec appareils PC-Windows ».

La solution trouvée, rapporte M. Richard, a été « d’octroyer à chacun-e un montant fixe de 1'000 CHF par an pour couvrir ses frais d’équipement ou de rééquipement, d’imprimante et de consommables (cartouches, papier, etc.) ». Libre à chaque élu-e d'axer ce poste de dépense comme il le souhaitait : Mac, ou PC ; ordinateur à la maison et impression des documents, ou ordinateur portable et utilisation des documents directement sur l'écran de la machine. Il est à noter que sur ce montant de 1'000 CHF par an, l'élu-e récipiendaire « ne devait pas rétrocéder une part à son parti ».

Pour Yves Richard, ce système a fait ses preuves et est resté pertinent jusqu'aux remontrances de l'OCAS : il « a fonctionné sans difficulté majeure, mais les techniques ont évolué, ainsi que la durée de vie des matériels. La plateforme CMNet a montré ses limites, et Versoix a transféré sa documentation sur l’actuel site internet Versoix.ch avec une rubrique « extranet » dédiée. De plus, les réseaux wi-fi se sont développés et les équipements aussi : des appareils de bureau, majoritaires en 2006, on est passés aux laptops, aux tablettes et aux smartphones. Le confort s’est amélioré, mais l’obsolescence des machines est devenue plus rapide… Le besoin de se rééquiper et de gérer les consommables est donc resté, ainsi que l’indemnité informatique de chaque membre du CM. ».

Du pareil au même, ou presque

Suite à une conversation avec le Conseil administratif et l'administration de la commune, M. Richard a été informé de la nécessité de changer ce mode de compensation suite au contrôle de l'OCAS. Après s'être concerté avec les président-e-s de partis à Versoix, le bureau qu'il préside a accouché de la solution unanimement approuvée en séance plénière de mars 2021 : « un jeton forfaitaire de 500 CHF par semestre, attribué après la première séance plénière, et ce dès le 1er janvier 2021 ». Un gage de la popularité de l'indemnité informatique : condamnée à disparaître, la voilà réincarnée en double jeton !

Oui, ce changement est tout sauf révolutionnaire, mais il aura malgré tout été un solide point de départ pour faire la lumière sur le fonctionnement de ces jetons et autres dédommagements. Une occasion idéale pour rappeler que nos élu-e-s font partie d'une groupe très restreint à pouvoir décider du montant de leurs propres revenus et dédommagements ; du moins, d'une partie d'entre-eux. Une position fort enviable, de ce point de vue tout du moins.

Texte et photo : Yann Rieder

auteur : Yann Rieder

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