12.08.2016 par YR
num.261 septembre 2016 p.06
Aéroport : l'initiative qui veut lancer le débat

Aéroport : l’initiative qui veut lancer le débat

«Reprenons en main notre aéroport !», tel est le slogan du comité qui a lancé, jeudi 11 août, la récolte de signatures de l’initiative constitutionnelle cantonale visant à renforcer le contrôle des élus sur le destin de Cointrin.

Vert de camouflage

Lors d’une conférence de presse organisée en plein air à Vernier, aimable bourgade subissant toute la journée le bruit généré par le trafic aérien, les initiants ont pris un peu plus d’une heure pour détailler les tenants et aboutissants de leurs propositions.

Alors que les intervenants n’ont pas manqué de rappeler que ce texte découle de la volonté d’associations d’habitants de communes genevoises, vaudoises et frontalières, il est difficile d’ignorer que la figure de proue de ce panel n’était autre que Lisa Mazzone (conseillère nationale, Les Verts), et que son invité spécial s’est trouvé être le conseiller administratif verniolan Yvan Rochat (Les Verts).  Leur présence n’est pourtant pas contre-nature, tant la question environnementale est au centre des préoccupations des Verts.

La pudeur autour de la couleur politique qu’on peut aisément attribuer à l’initiative peut se comprendre ainsi : le texte saura sans aucun doute compter sur les voix de l’alternative, aussi, en impliquant le plus tard possible le nom et donc l’image de ces partis de gauche, les initiants espèrent faciliter le soutien d’élus communaux de l’Entente tout autant exaspérés par le développement effréné de l’aéroport qu’eux, en leur évitant de donner l’impression de soutenir le camp politique adverse au leur.

Toutes les 90 secondes

Pour les initiants, l’Aéroport de Genève a déjà énormément grossi, et la perspective donnée pour son avenir les inquiète d’autant plus. Le plan sectoriel de l’infrastructure aéronautique (PSIA) prévoit un bond de 15 millions de passagers par an aujourd’hui à 25 millions en 2030. Le comité d’initiative estime que «pour les accueillir, il faudra 650 vols par jour, ce qui représente un avion qui décole ou atterrit toutes les 90 secondes, 18h/24».

Il leur apparaît comme impératif de ne plus s’arrêter aux conséquences positives de l’aéroport de Cointrain, mais également à ses coûts, notamment sur la lutte contre le réchauffement climatique. Sous forme écrite, le comité affirme : «tous les efforts effectués (transports publics, isolation des bâtiments, …) sur ces 10 dernières années ont été annulés par l’aviation ».

Nigel Lindup, représentant de l’Association des Riverains de l’Aéroport de Genève, s’insurge quant au manque d’actions prises pour combattre le bruit : «selon le “protocole de coordination” du PSIA, l’Office Fédéral de l’Aviation Civile considère que “les aéroports nationaux doivent pouvoir être développés pour répondre à la demande même lorsque … les valeurs limites d’exposition au bruit ne peuvent être partout respectées” ».

Ce que propose l’initiative

Dans le texte, cette proposition de révision constitutionnelle cantonale prévoit d’agir sur trois plans :

  • Premièrement, en demandant à la puissance publique de «trouver un équilibre entre [l’importance de l’aéroport] pour la vie économique, sociale et culturelle et la limitation des nuisances pour la population et l’environnement» en prenant «toutes les mesures adéquates». Une façon de mettre le canton de Genève devant ses responsabilités envers les riverains de l’aéroport lorsqu’il convient avec Berne de l’avenir de son aviation civile.

  • Deuxièmement, en rappelant à la direction de Genève Aéroport qu’il ne peut pas se soustraire à la volonté des élus, car il doit «[rendre] compte aux autorités cantonales et communales de la façon dont les objectifs précités sont planifiés puis mis en œuvre».

  • Troisièmement, en inscrivant noir sur blanc que «l’Aéroport international de Genève est un établissement de droit public», frein à toute volonté future de privatisation qui aurait pour effet direct de limiter l’influence des élus sur les choix de l’entité.

Si la récolte des signatures ne paraît absolument pas insurmontable, l’avenir de cette initiative dans les urnes reste incertain. Après l’échec référendaire des opposants au futur aéroport de Notre-Dames-des-Landes, qui peut deviner ce que les genevois voteront ?

Texte et photo : Yann Rieder

auteur : Yann Rieder

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