21.04.2012 par MJi
num.218 mai 2012 p.24
Comment découvrir des grues cendrées

 12 heures d'affût en Champagne, février 2012

Nous nous rendons en Champagne, en famille ou à deux, depuis 1986, chaque année pour observer les oiseaux hivernants et en particulier les grues cendrées. Plus de 74000 Grues ont été observées un jour de novembre 2010 et lors de la Migration prénuptiale, il y en avait 26000 environ le 16 février 2012.

La méthode est simple. Vous réservez un affût auprès de la LPO, vous passez la nuit au camping du Golf d'Arrigny. Belle chambre bien équipée, petit déjeuner matinal et hôtesse sympathique et souriante, même à 6h du matin. Et elle, elle ne va pas voir les grues. Après quinze jours de grand froid, nous nous étions équipés multi-couches et nous avons bien fait. Un petit vent frais passait dans les espaces d'un centimètre entre chaque planche de l'affût et pendant la période creuse, soit de 13h à 16h, il faisait frais.

Donc à 6h20 après une petite marche de 20 minutes à la lampe frontale nous nous installons dans notre affût pour 12 heures de silence. Impossible de sortir, les grues sont très sensibles aux bruits et surtout aux mouvements. Les téléobjectifs ne doivent pas dépasser de l'affût et il a suffit que je bouge légèrement mon 500 mm pour que 100 Grues décollent de 5 mètres er se reposent.

Dès 7h, dans la nuit, nous entendons les cris des premières grues. Précisons qu'en février, la LPO distribue des grains de maïs sur le terrain de la ferme aux grues afin d'éviter que ces oiseaux ne s'attaquent aux jeunes pousses et provoquent l'ire des agriculteurs. Ce jour-là, c'est quelques milliers de grues qui sont venus se nourrir, parader et voler autour de notre affût, l'occasion de découvrir de nombreux chants et pas seulement les cris entendus habituellement en vol :
Il y a le cri de l'éclaireur, un cri court et puissant, prévenant les autres qu'il y a à manger et qu'on peut se poser, celui accompagné d'un coup de bec lorsque le voisin est trop près, celui de Monsieur à Madame, ou le contraire, comme première prise de contact, celui de Monsieur à Monsieur, signifiant "t'as aucune chance, je suis bien plus beau" et celui du jeune qui se rend compte qu'il est à 5 mètres de l'affût et qu'il y a un truc qui bouge; un petit cri qui ressemble à celui du Pluvier doré, et qui appelle ses parents restés à 50 m.
Toute la famille s'envole alors de concert. De très nombreux comportements, il faut dire qu'en 9h de présence des grues, il y a de quoi faire. De 8h à 13h ce sont plus de 2000 individus qui se trouvent entre 5 m. et 200 m de l'affût. Puis à 13h, plus rien, c'est l'heure de la balade digestive. Heureusement, une grande Aigrette était chargée de nous occuper de 13h 30 à 15h30. Elle a très bien tenu son rôle en nous captivant pas sa démarche chaloupée, probablement en frappant le sol pour attirer les campagnols. Elle se dandine donc puis se fige, cou tendu, sans bouger pendant de longues minutes et hop, elle capte une proie et se relève avec un campagnol. En 2 heures, elle en a attrapé 4 et est resté postée sans bouger 3 fois.
Pour les quatre heures quelques centaines de grues sont revenues.

En fin de journée, toutes les grues sont parties. Toutes ? non pas toutes. Une famille résiste, peut-être pas une gauloise mais une basque ! Les deux adultes sont resté à 50m. Ils n'ont pas bougé pendant 20 minutes mais à deux, ils couvraient tout le territoire. les deux jeunes, dont un avec un bec légèrement déformé sont venus manger jusqu'à 5 m de l'affût. Probablement qu'il leur était difficile de manger tranquillement lorsque la troupe était là. Les parents ont attendu patiemment et lorsque les petits ont eu terminé, toute la famille s'est envolée pour le lac du Der pour la nuit. Le lac était presque entièrement gelé. Seule demeurait libre une petite zone au large de l'église de Champaubert où se regroupait une harle piette, des harles bièvre, des garrots, des cormorans et un grand groupe de grèbes huppés. Quelques troupes d'oies cendrées se trouvaient également dans la région.
Nous avons attendu 15 minutes et nous sommes partis.
Une bonne nuit et un repas gastronomique au Cheval Blanc à clôturé cette magnifique journée.

auteur : Michel Jaussi

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