26.04.2012 par TM
num.218 mai 2012 p.03
Optimisme genevois, réalisme versoisien

Après quelques jours à Versoix, le Conseiller d'Etat Charles Beer, accompagné du Maire Cédric Lambert, exposait à la presse une série de mesures oeuvrant à améliorer la cohésion sociale dans quartier de la Pelotière.

En décembre dernier, M. Lambert nous présentait son dernier-né, un projet s'appuyant sur la concordance de deux subventions, l'une fédérale, l'autre cantonale et auxquelles Versoix s'était portée candidate. L'objectif : assurer la continuité de la Ville dans une zone où règne la précarité.
Toujours isolée géographiquement et socialement après une quinzaine d'années, la Pelotière ne s'inscrit pas encore dans le prolongement de la Cité. C'est si vrai que l'Etat et la Confédération ont eux-mêmes acquiescé la nécessité d'accorder une aide financière pour arrêter un phénomène d'éloignement dans un des quartiers les plus défavorisés du Canton.
Le projet, qui se déroule en plusieurs phases, vise à encourager les initiatives spontanées, à soutenir les associations, à stimuler le développement de l'artisanat et du commerce dans le quartier de la Scie, ainsi qu'à mettre en route une aide sociale d'urgence pour les jeunes en difficulté. L'antenne médico-pédagogique s'inscrit aussi dans ce cadre et verra donc finalement le jour avant la rentrée.
Tout en constatant le bon fonctionnement d'Ecole et Quartier, qui est l'une des caractéristiques de "l'exception versoisienne", M. Beer pense que l'une des clés de l'assimilation de la Pelotière pourrait s'y trouver: la création d'un organe similaire à E&Q au niveau du périmètre. Il précise aussi que les difficultés, notamment pour l'AMP, n'ont jamais été pécuniaires. Il nous avoue même qu'il ne croit pas à la répartition "yaltesque" des tâches, mais plutôt à une collaboration concertée qui pourrait parfois peiner à se concrétiser.
Toujours est-il que le Conseiller d'Etat nous assure que des mesures spéciales, telles que l'arrivée un éducateur hors-mur pour le primaire, ont déjà été mises en place: "une première", selon lui. Rappelons que le taux de pauvreté et la diversité des cultures logeant aux Fayards rend la tâche plus difficile ; il semblerait même que des associations communautaires aient été contactées pour des cours de langue et pour alphabétiser les plus démunis.
Mais plus qu'au communautarisme, on pense à l'intégration, le fait de participer à un projet de société, de bien vivre ensemble et d'épanouissement. Or, le fait d'avoir mis précaires et étrangers de tous bords ensemble dans un même quartier rend cette assimilation plus difficile. M. Beer estime pourtant que "quand on parle de Versoix, on parle de ghetto [le mot lui avait donné en question] et quand on parle de la Ville de Genève, on dit <<la Genève internationale>>", mais il précise que pour la précarité, on essaie désormais de faire passer un message d'homogénéisation auprès des régies, des associations et des autres acteurs économiques concernés, afin d'éviter d'avoir à assumer des conséquences qu'on pourrait d'abord prévenir.
Oui, bien sûr, la question débordait de son département, mais on peut douter que la mesure soit efficace, d'ailleurs c'est bien le talon d'Achille de la politique genevoise, notamment avec le Plan Directeur Cantonal 2030. Celui-ci impliquerait de densifier encore plus une région presque aussi dense que Tokyo sans commune mesure organisationnelle et écologique. Plus grave encore, jamais les causes de cette crise du logement, qu'elles soient financières ou matérielles (espace restreint) ne sont abordées. La seule idée que ce plan nous inspire est d'ailleurs une coopération franco-valdo-genevoise pour Régio-Nage et pour une salle omnisports, auxquels l'Etat songe désormais, comme en attestait M. Beer.
Mais au-delà de ça, au-delà des bons procédés, au-delà de "la Genève internationale" qui pose son lot propre de problèmes, dans des buts souvent privés et de moins en moins nobles, au-delà des causes qu'on ne veut pas voir et des solutions à court terme, pourra-t-on enfin espérer une vraie coopération cantonale ?
Pourra-t-on vraiment faire preuve d'un tel optimisme ou bien serons-nous contraints à cet éternel réalisme salutaire?

auteur : Thomas Mazzone

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