16.01.2017 par PAD
num.265 février 2017 p.13
Vendée Globe : Alan Roura franchit le Cap Horn le 16 janvier

Bonne nouvelle, après Bonne Espérance et le Cap Leeuwin, le Cap Horn devrait être fanchi par le versoisien Alan Roura (et son compère La Fabrique) ce 16 janvier 2017 à 17h39 après 71 jours 4h et 37 min de course héroïque. Le plus jeune concurrent du vendéée globe de tous les temps se trouve en 13e position sur 29 concurrents au départ. C'est un véritable exploit compte tenu de l'ancienneté de son bateau et des moyens dont dispose son team formé de 2 copains et de sa compagne. On peut lui décerner le titre de Mac Giver des marins intrépides !

Voilà ce qu'on peut lire sur son site alanroura.com 3/4h. plus tard :

JOUR 72 - 13ème au cap Horn ! 

Alan Roura, skipper de La Fabrique, a passé ce lundi 16 janvier à 17h39 (heure française) le cap Horn, troisième et dernier grand cap du parcours du Vendée Globe. Le jeune Suisse réalise là un temps Les Sables d'Olonne - Horn de 71 jours, 04 heures et 37 minutes, soit 8 jours de plus que Michel Desjoyeaux, vainqueur du Vendée Globe 2000 (édition pour laquelle l'IMOCA La Fabrique a été construit). S'il parvient à accélérer légèrement le rythme pendant sa remontée de l'Atlantique, le benjamin de cette huitième édition du tour du monde en solitaire devrait pouvoir atteindre son objectif de boucler sa boucle en moins de 100 jours : Desjoyeaux avait terminé en 93 jours, 3 heures et 57 minutes.

« Ca fait deux heures que je vois la côte, en distinguant très bien le relief de la terre de feu, avec son pic, le cap Horn, droit devant. Je l’ai rasé, je suis passé à 2 milles, dans 33 noeuds de vent, dans une mer démontée. C’était magnifique, exactement comme je me l’étais imaginé : des albatros de partout, la mer à la fois blanchie et noire, un ciel magnifique, même sans soleil, dans plusieurs nuances de gris, avec des nuages très foncés, beaucoup de grains… Je suis au bout de la planète, à la pointe la plus Sud du monde, c’est absolument incroyable. Je ne sais pas quoi dire… » De l’émotion plein la voix, du haut de ses 23 ans, Alan est devenu cap-hornier. Le plus jeune de l’histoire du Vendée Globe, cette fabuleuse course autour du monde ou tout marin, tout Homme, se retrouve grandi et changé. Avant de mettre le cap au Nord, le skipper de La Fabrique fêtera sa dernière case cochée, son dernier des trois grands caps, en sabrant une bouteille de Mousseux de Bonvillars offerte par la famille Cornu avant le départ. « Je vais fêter ça comme il se doit, en offrant surtout une bonne rasade à mon bateau, qui la mérite amplement, est parvenu à articuler Alan, des sanglots dans la voix. Il a été bien sage, c’est aussi grâce à lui que je suis là aujourd’hui. Ce moment restera gravé à vie, c’est le Graal des marins et j’y suis. J’ai réussi mon pari, mon défi du Vendée Globe. J’ai fait le grand Sud… J’ai une pensée émue pour ceux qui ont dû s’arrêter avant. Je suis très fier de moi, de ce que j’ai accompli. J’ai tellement de chance d’être là, c’est juste génial. »

Images à couper le souffle :

Autre moment génial à retenir de ce lundi 16 janvier ? « J’ai vu un gros oiseau à hélices qui m’a survolé pendant une demi-heure » a plaisanté Alan. Ce gros oiseau n’était autre qu’un avion loué par la société Prodis Security, partenaire du collectif Un Vendée pour La Suisse, parti du Chili à la rencontre de son protégé. «Je relève le défi du meilleur sponsor, celui qui va au bout du monde voir son poulain passer le cap Horn, chapeau !» s’est esclaffé le jeune Suisse, toujours submergé par l’émotion. Photos et vidéos disponibles très bientôt !

Voilà ce que disait Alan sur le site vendeeglobe.org le matin avant son passage du Horn : 

Bientôt le cap Horn
«Le Cap Horn, c’est une sacrée étape dans la course et dans la vie d’un marin. On ne va pas avoir des conditions faciles pour l’atteindre, et aussi après l’avoir franchi. On va essayer de le passer en sécurité, on n’est pas là pour battre des records. J’essayerai de fêter ça comme il se doit, et surtout de voir ce fameux rocher ! C’est sympa de partager cette expérience avec des concurrents à proximité, d’autant qu’on se tire la bourre depuis un moment.»

«Je quitte les mers du Sud avec fierté»
«D’un côté, les mers du Sud ont été conformes à mes attentes, mais d’un autre côté pas du tout… C’est assez étrange. Je ne sais pas si j’ai vécu un Grand Sud facile ou difficile, car c’est la première fois que je navigue dans ces mers. C’est un grand soulagement de retrouver l’Atlantique, cela marque le retour à la maison. J’espère y avoir des conditions un peu plus clémentes, car le Pacifique m’en aura fait voir de toutes les couleurs. Je quitte les mers du Sud avec plaisir et fierté d’avoir pu m’en échapper. Je vais pouvoir me remettre en mode course. »

«Un sentiment de liberté incroyable»
«Le sentiment de liberté est incroyable dans le Grand Sud. C’est paradoxal car après 70 jours seul sur un bateau, on se sent aussi emprisonné. Mais quand on sort la tête dehors et qu’il y a un rayon de soleil, c’est le paradis sur terre.»

Voilà ce que dit aussi Alan sur son site alaroura.com le matin de son passage du Horn :

JOUR 72 - Message du bord
Publication : lundi 16 janvier 2017 11:04

Hier soir, le GPS affichait moins de 100 milles pour le cap Horn, après une longue journée de bataille à faire avancer le bateau dans des vents inconstants et une mer très agitée. Aujourd’hui sera un grand jour dans ma vie de marin, ma vie de gamin qui a toujours rêvé de Vendée Globe. Je me retrouve là, à la fin de ce grand Sud, avec de nouveau une météo très compliquée à comprendre, mais la récompense est juste là, droit devant moi.

Je suis presque au niveau de Newport US, ville d’arrivée de ma qualification. C’est drôle mais du coup, j'aurai déjà tourné autour du globe en solitaire ce soir. Dans une dizaine de jours, je croiserai mon sillage pour boucler la boucle, mais c'est déjà une grande fierté ce soir.

Le cap Horn risque d'être comme sur les vidéo que l'on montre en école de voile, pour montrer au enfants ce qu'est la mer quand elle se déchaîne. Au fond de moi, même si ça ne me réjouit pas forcément de reprendre du gros temps (surtout aussi proche de la terre), je me dis que j'aurai vraiment vécu le Sud comme on se l'imagine. Dur, fatigant, avec grosse mer, tempêtes, avaries, etc. Je pourrai rentrer la tête haute chez moi et pouvoir un jour je l’espère, raconter cette aventure à mes gosses, qu'ils transmettront ensuite à leurs enfants. J’adore ce que je fais, c'est ma vie, j'ai galéré pour en arriver là et cette fois, mon histoire s'écrit. Un homme, un bateau, et trois océans.

Demain sera le jour où je pourrai dire : « Ouais, je l'ai fait ! Je peux pisser au vent ! »

Je suis fier et heureux d'avoir, avec mon équipe, réussi à arriver là. D’avoir réussi, simplement. Réussi à écrire une histoire avec ce merveilleux bateau, une histoire qui fait rêver les gens, une histoire que j'ai rêvé pouvoir écrire un jour. Ramener la Bigoudène dans l'océan où elle a été mise à l'eau, là où j'ai grandi.

Horn, tu fais rêver les marins,
Tu fais peur à certains,
Quand le vent glacial de ton océan austral,
Laisse parmi les albatros se faufiler une larme.
Larme de joie, larme de bonheur,
Cette aventure restera gravée dans mon coeur.
Si je regarde à l'horizon,
Dans quelques semaines, ce sera un bon steak-frites maison.

 Lire aussi l'article de Grégoire Surdez dans la TdG du 16 janvier

 

 

auteur : Pierre Dupanloup

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