02.09.2010 par ALBB
num.201 sept. 2010 p.05
Relogement des forains ... c'est pour bientôt

On en reparle … 10 ans plus tard
Souvenez-vous ! C’était en 2000. Le Conseil municipal avait voté un crédit pour le relogement des forains sur la parcelle dites «des Hôpitaux» tout près du centre sportif. Un référendum avait été lancé et la population a refusé le déménagement à cet endroit.

Dix ans plus tard, un nouveau projet est à bout touchant, à un jet de pierre (ou presque) du premier. Une parcelle appartenant à l’Etat, sise entre la route de l’Etraz, le chemin de Braille et le train. Ce terrain a été déclassé par le Grand-Conseil à cet effet. Une autorisation de construire a été déposée et le service juridique du DCTI est en train de traiter les derniers recours.

Dans cette mouture, il a été décidé de créer une zone de logement pour les forains à Versoix et un parking pour leurs manèges et autres engins au Grand-Saconnex (vers l’Aéroport et l’Autoroute). Un crédit total de SFr. 12’800’000.- comprenant l’équipement des parcelles dévolues tant à l’habitation qu’au stockage du matériel et ainsi qu’une partie des frais de déplacement vient d’être proposé par le Conseil d’Etat.

Les prix des emplacements d’habitations ont été redéfinis par la commission fédérale qui traite ces tarifs. Les loyers mensuels se monteront à SFr. 285.- pour les forains, SFr. 240.- pour les gitans de passage, étant clair que l’eau, l’électricité et le gaz seront facturés en plus. Vu le nombre de forains établis à Versoix, il ne restera guère d’espace pour le gens du voyage. Les locataires doivent fournir eux-mêmes leurs logements ce qui représente un coût important.

Le départ des forains du Molard qu’ils occupent actuellement permettra la suite de la renaturation du vallon de la Versoix et évitera que cette population continue à vivre dans une zone inondable.

Les «pour» et les «contre»
Bien sûr, tout changement fait peur et le déplacement de toute une communauté n’est pas aussi simple qu’imaginé sur le papier. Certains craignent un éloignement du village facilement atteignable à pied depuis le Molard, alors que d’autres se réjouissent de voir l’espace de vie augmenter. De plus, certains logements sont moins mobiles qu’on croyait. Il y aura des rires et des larmes, mais impossible de revenir en arrière : le projet est inéluctable.

Une majorité des forains se réjouit pourtant de relever le défi. Leurs familles ont grandi et le besoin d’espace proportionnellement. Déjà aujourd’hui, une partie du matériel est stocké à Vernier dans un parking fermé. Le grand inconvénient de cette solution est le manque d’eau et électricité pourtant indispensables à l’entretien des manèges et l’éloignement. C’est pour cette raison que, régulièrement, l’un ou l’autre des engins est rapatrié à Versoix pour une réparation. Idéalement, la future place pour l’entreposage devra avoir l’eau et l’électricité. Quelques forains rêvent même d’une certaine souplesse quant à la présence sporadique de carrousel près des logements pour pouvoir mieux les bricoler.

Les forains habitent à Versoix depuis plus de 40 ans lorsqu’ils ont été chassés de la Queue-d’Arve de manière peu élégante (le terrain leur avait été offert, mais la Genève de l’époque n’a pas respecté cette donation). Ils ont été relégués «le plus loin possible» à Versoix qui, à l’époque, était un peu le bout du monde du canton.

Cette communauté s’est intégrée à Versoix. On y naît, on y meurt. Ses enfants partagent les bancs d’école avec les autres habitants et nombreuses sont les tombes décorées de roulotte au cimetière. Il semble donc logique que cette grande famille puisse rester où elle a pris racine. C’est d’ailleurs son vœu le plus cher. Ici, elle se sent «à la maison», bien que cela puisse paraître paradoxal.

Bien sûr, le mode de vie nomade peut interpeller certains. Les différences font toujours peur parce qu’elles rappellent que notre façon de penser, notre couleur de peau, notre nationalité, notre langue ne sont pas uniques. Pour qu’un arc-en-ciel soit beau, ne faut-il pas une infinité de couleurs ? Il en est de même pour notre société !

Anne Lise Berger-Bapst

auteur : Anne Lise Berger-Bapst

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